APPRENDRE DE NOS DÉFAITES ET REVENIR À DIEU


Introduction

Qui a dit : « Je ne perds jamais. Soit je gagne, soit j’apprends. » ? Cette phrase est de Nelson MANDELA (1918-2013). Cet illustre homme restera dans l’histoire la figure emblématique du combat contre le système politique institutionnel de la ségrégation raciale (l’apartheid) en Afrique du Sud. Son combat politique contre l’Apartheid et pour l’égalité des droits, le conduira en prison pendant 27 ans. Libéré le 11 février 1991, il finira par accéder à la présidence de son pays qu’il dirigea de 1994 à 1999. Mandela avait appris, entre autres, que pour gagner contre l’Apartheid, il fallait changer de regard sur ses ennemis d’hier en faisant d’eux des partenaires pour construire une nation arc-en-ciel  réconciliée et pacifiée.  Et si comme Mandela, nous apprenions à voir autrement nos échecs, nos défaites, nos erreurs, nos épreuves ?

En ce début d’année où nous nous souhaitons des vœux de bonheur et de succès, je prie que nous restions enseignables. Que le Seigneur nous apprenne à nous appuyer davantage sur lui, notre pierre de secours. C’est ce message qui est au cœur du texte que je vous propose de méditer ensemble ce matin.

Lecture biblique : 1 Samuel, chapitre 7, versets 1 à 13

  • Contexte historique : Quand Israël abandonne le Dieu de l’alliance

Les livres de Samuel qui relatent la transition entre la période des Juges et  celle des rois avec l’institution de la monarchie, mettent en scène trois grandes figures : Samuel, à la fois dernier juge et prophète d’Israël, Saül le roi rejeté,  et David le roi selon le cœur de Dieu.

Notre récit nous relate en particulier une période troublée et douloureuse de la vie d’Israël. Les versets 1-2 mentionnent les gémissements du peuple après le retour du coffre ou de l’arche de l’Eternel qui se trouvent depuis près de vingt ans dans une des villes qui avaient été attribuées aux descendants de Juda lors de la conquête de Canaan à l’époque de Josué (cf Josué 18.11s). Mais que s’est-il passé pour que l’arche de l’Eternel, symbole de sa présence au milieu de son peuple, ne se trouve plus à Silo, mais dans la ville de Quiriath-Yéarim ?

La cause profonde de cette situation s’explique par le fait que les Israélite se sont détournés du Dieu de l’alliance. Contrairement à l’engagement ferme de servir l’Eternel, et lui seul pris sous Josué (Lire Josué 24 : 16, 21-23), la période que couvre le livre de Juges nous montre, peu de temps après la mort de Josué,  l’incapacité incurable des Israélites à se hisser à la hauteur des attentes du Dieu de l’alliance.

Les Israélites non seulement ne parvinrent pas à achever la conquête du pays promis, mais surtout, la nouvelle génération abandonne l’Eternel pour se tourner vers les idoles païennes. Dieu permet alors qu’Israël soit dominé par ses ennemis. Israël crie vers Dieu. Dieu suscite des juges et des prophètes. Le peuple revient alors vers Dieu. Suit une période de paix, mais une rechute n’est jamais loin.

A l’époque de Samuel, ce même schéma se répète, nous laissant cette impression que le peuple n’apprend pas vraiment de ses erreurs, de ses échecs. L’abandon de Dieu, le refus de le laisser conduire vraiment nos vies, voilà la racine de nos défaites.

  • La défaite d’Israël par les Philistins et la prise de l’arche de l’Eternel est la conséquence d’une succession de fautes 


  • La déchéance morale des fils d’Eli

Dès le chapitre 2, le texte nous parle du mauvais comportement des fils d’Eli, qualifiés de « vauriens qui ne connaissaient pas l’Eternel » (2.12) et qui traitaient avec mépris les offrandes apportées au Seigneur, en se servant les premiers.  

La déchéance morale des fils d’Eli était telle qu’ils sont allés jusqu’à coucher avec les femmes qui se rassemblaient devant la tente de la rencontre. Abusant de la vulnérabilité de ses femmes ou se servant d’elles comme des prostituées « sacrées » ( ?)

Bien-aimés, prenons garde à ne pas ressembler à ces serviteurs qui sont à leur propre service, qui pensent avant tout à leur estomac, abusent de leurs privilèges ou statut,  et se servent du nom de Dieu, de l’Eglise de Dieu pour assouvir leur désir… Malheur à de telles personnes !

  • La faiblesse d’Eli

Eli est vieux et fatigué, mais il reste une autorité spirituelle et morale importante. Mais le vieux Elie qui va essayer de raisonner ses fils (2.22-23) se montre in fine faible.  L’erreur d’Elie fut de ne pas avoir pris une décision, une sanction à l’égard de ses fils (3.13). Il y a ici aussi un enseignement pour nous parents. Et je sais combien nous pouvons être faibles et complaisants lorsqu’il s’agit de prendre une décision difficile à l’égard d’un de nos enfants. 

La faiblesse d’Eli à l’égard de ses fils, ne permit pas à ses fils d’apprendre de leur arrogance et de leur mauvais comportement.  Dieu lui-même allait devoir les stopper. Et c’est le jeune Samuel, le fils spirituel d’Eli qui devra lui faire connaître la sanction décidée par l’Eternel : Dieu agira contre la famille d’Eli comme le montre les chapitres 4 et suivants.

  • La superstition : prendre l’arche de l’Eternel comme un Talisman

Comme souvent, l’infidélité spirituelle d’Israël conduit, entre autres, à sa sujétion par les peuples ennemis. Les Philistins faisaient partie de ces peuples souvent en guerre contre Israël. Les chapitres 4 et 5 nous relatent plusieurs épisodes de guerre opposant IsraËl au Philistins. 

Une bataille éclata dans la région d’Eben-Ezer (nous en reparlerons plus loin), et les Philistins gagnèrent Israël en lui infligeant une perte de près de 4000 hommes. Les anciens d’Israël se demandèrent : « Pourquoi l’Eternel a-t-il laissé aujourd’hui les Philistins nous battre ? » (4.3)

Un questionnement fort intéressant. Apprendre de ses défaites commence par cette capacité d’examen, d’analyse, d’effort de compréhension de ce qui n’a pas marché. Mais remarquons que le questionnement des anciens oriente davantage à expliquer la défaite par le fait que Dieu les aurait abandonné. Ce serait la faute de Dieu qui a permis que cette défaite leur soit infligée ! Ce n’est pas d’aujourd’hui que Dieu a bon dos quand ça nous arrange ! 

Après réflexion, « eurêka », ils ont trouvé le pourquoi du comment de leur défaite. S’ils ont perdu, c’est que l’arche de l’Eternel n’était pas au milieu d’eux. Donc, Dieu n’était pas en campagne militaire avec eux. Alors, ils décident de sortir l’arche de l’alliance de l’Eternel du sanctuaire de Silo avec la complicité des fils d’Eli Hophni et Phinées (4.4).  Tout se passe comme si Eli était définitivement incapable, hors-jeu. 

 Les Israélites sont tombés dans une croyance pernicieuse, qui consiste à croire que parce que l’arche de Dieu, qui symbolise sa présence est au milieu d’eux, peu importe leur conduite, Dieu sera toujours pour eux. Ces derniers, au lieu de rechercher Dieu, prirent l’arche de Dieu comme un talisman, et la portèrent dans leur camp militaire.

Ils vont donner l’impression d’être à la hauteur de leurs adversaires. Mais l’illusion ne fonctionne qu’un court instant. Quand la bataille s’engage, les Philistins prennent le dessus et leur infligent une défaite encore plus lourde que la première. Cette fois, il y a plus de 30000 fantassins Israélites qui sont tués, y compris les deux fils d’Eli, en dépit de la présence dans le camp de l’arche de l’Eternel. Celle-ci est d’ailleurs emportée par les Philistins comme un trophée de guerre. Quelle humiliation !

Le retentissement de cette défaite fut tel qu’à l’annonce de la prise de l’arche de l’Eternel par les Philistins, Eli s’écroula et dans sa chute se brisa la nuque. L’une de ses belles-filles qui attendaient un enfant fut prise de contractions violentes et mourut en couche en disant : « La gloire est bannie d’Israël, car l’arche de Dieu est partie. »

Chers amis, devant cette triste chronique d’une défaite annoncée ? Quels enseignements pouvons-nous en tirer pour nous aujourd’hui ?

  • Apprenons-nous de nos erreurs et de nos défaites ?

« Je ne perds jamais. Soit je gagne, soit j’apprends » disait Mandela. Nos défaites, nos échecs nous apprennent parfois plus que nos succès. Alors que gagnons-nous lorsque nous réfléchissons à nos défaites, à nos erreurs, à nos épreuves ?

  • Dieu n’est pas un talisman : ne pas confondre foi et superstition

L’une des erreurs d’Israël et qui nous concerne aussi aujourd’hui  c’est de nous enferrer dans une croyance superstitieuse qui voudrait que parce que nous avons les signes de la présence de Dieu au milieu de nous, peu importe comment nous nous conduisons, il est avec nous. Erreur. Ce n’est pas parce que nous avons une Bible, que nous la lisons, même régulièrement que nos vies sont changées. J’irai même plus loin, ce n’est pas parce que nous chantons et proclamons le nom de Jésus, le nom qui sauve, que nos vies sont transformées. Ce n’est pas non plus parce que nous fréquentons ou non une Eglise que nos vies sont transformées. Il y a une différence entre connaître les signes de Dieu et connaître Dieu. Les Israélites connaissaient ce que représentaient l’arche de l’Eternel, mais ils ne connaissaient pas l’Eternel. Beaucoup de chrétiens, connaissent la Bible, le nom de Jésus, leur Eglise, mais malheureusement ne connaissent pas vraiment qui est Dieu. Le nom de Jésus et la Bible sont devenus pour certains comme des talismans. Leur vie est une série de défaite et d’échecs, parce qu’ils n’ont pas compris que Dieu ne se laisse pas duper ni impressionner par l’apparence de la foi.

La foi authentique n’est pas une superstition pieuse. La foi authentique est celle qui nous conduit à la repentance et à l’obéissance.

  • La repentance sincère et l’obéissance valent mieux que la religiosité

Lorsque nous réfléchissons à nos échecs, à nos défaites, on peut espérer grandir en humilité parce qu’on apprend à reconnaître ses erreurs. La Bible nous enseigne que Dieu résiste aux orgueilleux et relève les humbles. Nous avons besoin d’humilité pour apprendre à reconnaître nos erreurs, nos fautes et ne pas nous bercer d’illusions vaines ou nous défausser sur d’autres. 

La défaite d’Israël n’était pas la faute de Dieu. Au contraire, malgré les erreurs d’Israël, le Dieu de l’alliance est fidèle et demeure le Dieu très haut qui domine sur les idoles des Philistins (cf. chapitre 5)et conduit son projet salvateur jusqu’à son accomplissement. 

Mais même si l’arche est de retour, elle ne sera pas à Silo. Le sanctuaire corrompu est déclassé. Pendant plus de 20 ans, les Israélites soupirèrent après le retour de l’arche à Silo. Samuel ne se laisse pas tromper par des soupirs qui ne seraient pas motivés par une repentance sincère. La solution à ce problème viendra de l’écoute de la parole de Dieu suivie d’une réelle conversion des cœurs. Samuel dit à toute la communauté d’Israël :

« Si c’est de tout votre cœur que vous revenez à l’Eternel, enlevez du milieu de vous les dieux étrangers et les Astartés, dirigez votre cœur vers l’Eternel et servez-le lui seul. Il vous délivrera alors de l’oppression des Philistins. » (1 S 7.3)

Les Israélites obéissent et enlèvent leurs idoles et entre dans une nouvelle démarche de sanctification, de consécration (cf. v.4-6). L’obéissance à Dieu vaut mieux que la religiosité et les actes valent mieux que de belles déclarations de foi !

Dieu va éprouver la conversion de son peuple en permettant un nouvel assaut des Philistins… Comment réagirons les Israélites cette fois ? Ont-ils appris des précédentes défaites ?

 Les Israélites ont appris. Ils ne demandent pas de faire venir l’arche de Kiriath-Yearim, mais ils demandent à Samuel d’intercéder pour eux : « N’arrête pas de crier pour nous à l’Eternel, notre Dieu, afin qu’il nous sauve de la domination des Philistins… Il cria à l’Eternel pour Israël et l’Eternel l’exauça. » (1 S 7.8-9)

Quel rebondissement ! Quel relèvement ! En dépit de nos erreurs, Dieu demeure fidèle et nous relève. Dieu demeure fidèle et vient au secours de celui qui revient sincèrement à lui. J’ai appris de mes défaites. J’ai appris l’humilité, j’ai appris la sincérité, j’ai surtout appris que la plus grande défaite, c’est de ne plus jamais revenir et ne plus espérer en son secours.

Conclusion : La plus grande défaite, c’est de ne plus s’attendre à Dieu

« Je ne perds jamais. Soit je gagne, soit j’apprends » Au commencement de ce message, je posais la question : Et si comme Mandela, nous apprenions à regarder différemment nos échecs, nos défaites, nos épreuves ?

Cet épisode de la vie Israël nous apprend qu’en dépit de nos erreurs, Dieu demeure fidèle et est toujours prêt à nous restaurer, lorsque nous revenons à lui d’un cœur sincère. Aujourd’hui, il n’est plus nécessaire d’égorger un agneau, car Jésus, l’agneau de Dieu qui ôte le péché du monde, est mort pour nous quand nous étions encore pécheurs. Ainsi Dieu nous a secourus. 

L’année 2020 restera dans les mémoires de l’Histoire une année tristement douloureuse pour le monde entier. Nous avons connu la maladie, les deuils, la peur et bien d’autres inquiétudes pour nous ou nos proches. Nos vies continuent d’être chamboulées… Et pourtant, même au milieu de nos détresses,  nous pouvons confesser avec le prophète Samuel  que le Dieu d’Israël a été, est, et demeure, pour nous aussi, « Eben-Ezer », la pierre ou le rocher du secours.

« Jusqu’ici », nous invite à jeter un coup d’œil vers le rétroviseur pour voir combien le Seigneur nous a secourus, protégés, fortifiés, encouragés au milieu d’une année horriblement difficile. Il a veillé sur chacun de nous. Il a continué de prendre soin de notre Eglise, de la cohésion de l’ensemble, renouvelant nos forces jour après jour. Avons-nous manqué de l’essentiel ? Dans son infinie bonté, Dieu a été pour nous Eben-Ezer, le roc séculaire qui est pour nous un refuge qui ne manque pas dans la détresse.

« Jusqu’ici », tout n’est pas terminé ! Oui, « jusqu’ici » nous indique que notre voyage n’est pas terminé. Si le conducteur de l’auto gardait ses regards uniquement sur les rétroviseurs il ne manquerait assurément pas un accident. Il nous faut donc encore porter nos regards en avant, tant que nous poursuivons le voyage en avançant par la foi. Grâce à elle, nous verrons le panorama des grâces à venir. Comme l’écrivait Charles Spurgeon : « Il reste l’éveil dans la ressemblance à Jésus, les trônes et les harpes, les cantiques et les palmes, les vêtements blancs et le visage de Jésus, la gloire de Dieu, la plénitude de l’éternité et l’infini de la félicité. »

Alors, ne soupirons pas seulement après le retour de nos libertés et de notre vie d’avant, mais soupirons après le retour du Seigneur lui-même.  Avons-nous, plus que jamais, soif de sa présence à nos côtés, chaque jour à chaque heure ?

Je formule le vœu que la foi de chacun-e demeure fermement ancrée en celui qui demeure l’Eben-Ezer de nos vies, la pierre de secours sur laquelle nous pouvons nous appuyer en toutes circonstances. Amen !

Auteur : Pasteur Paul EFONA