BARNABAS UN HOMME REMPLI DE L’ESPRIT


Actes 11.19-26

Notre pasteur Paul nous a posé, dimanche passé, une colle. Comment se représenter le St-Esprit. Pouvons-nous le dessiner et que mettre sur le papier ? Une colombe, des langues de feu, dessin montrant l’action du vent (tourniquet, arbre ployant sous son effet) ? Tout cela peut représenter un aspect de la personne du St-Esprit, mais sa réalité de troisième personne de la trinité est plus complexe et c’est ce qui a été souligné. Aujourd’hui je vais aussi vous poser une colle. Comment vous représentez-vous une personne remplie du St-Esprit ? Une icône avec une auréole sur la tête ? Quelqu’un de particulièrement brillant qui occupe les premières places dans l’Église ? Quelqu’un de toujours prêt à raconter ses merveilleuses expériences, qui ne rencontre jamais de problème ? Toujours souriant, l’alléluia à la bouche ? Qui parle en langues ? Un peu caricatural tout cela. Posons-nous aussi la question : sommes remplis d’Esprit-Saint ? Le mieux pour tenter cerner la réponse est de prendre un exemple pratique. Lisons ensemble Actes 11.19-26.

Verset 24, il nous est dit que Barnabas « était un homme bienveillant, rempli d’Esprit-Saint et de foi ».

A ce stade du récit, pour le lecteur du livre des Actes, Barnabas n’est pas un inconnu, il est cité, comme exemple, pour le don du prix de la vente d’un terrain à la communauté. Il apparaît plus tard avec Saul de Tarse qu’il introduit dans la communauté de l’Église. Il s’appelle en fait Joseph. C’est un lévite, originaire de Chypre, surnommé Barnabas par les apôtres, nom qui peut signifier fils d’exhortation, fils de consolation. En hébreu, « Bar Nebouah » signifie littéralement « fils de prophétie ». Et c’est bien ce qu’il était par son enseignement. 

Aussi, quand arriva d’Antioche des nouvelles faisant état d’une œuvre nouvelle parmi les païens, initiée par des chrétiens originaires de Chypre et de Cyrène, les apôtres décidèrent d’envoyer, non pas l’un des leurs, mais le « chypriote » Barnabas, « un homme bienveillant, rempli d’Esprit Saint et de foi » pour observer ce qui se passait et en rendre compte.

Son constat

« Il constata ce que la grâce de Dieu avait accompli ». L’étonnement, l’émerveillement. Sans l’action des apôtres, ni de quelque envoyé de l’Église de Jérusalem, l’œuvre de Dieu dans les cœurs de ces païens s’était accomplie sur la base du témoignage d’anonymes, originaires de Chypre et de Cyrène. Sans l’aval de l’Église mère, transgressant des interdits, ils avaient témoigné auprès de gens qui n’avaient aucun arrière-plan « biblique » dirions-nous aujourd’hui de la grâce qui se trouve en Jésus-Christ. 

Barnabas voit, constate. La vision de la grâce de Dieu s’impose de prime abord. Tout n’était certainement pas parfait, bien des choses dans la vie de ces tout nouveau convertis issus du paganisme devaient certainement être corrigées, l’enseignement complété, précisé. Mais cela ne lui a pas voilé la manifestation de la grâce de Dieu en faveur de ces personnes. C’est ce qu’il voit en premier. Barnabas est un homme qui sait voir la grâce de Dieu là où d’autres probablement ne la discerne pas.

Ce n’est pas la première fois qu’il manifeste son discernement. Lui seul avait cru en l’œuvre de Dieu en Saul et discerné tout le potentiel qu’il y avait en Saul de Tarse. Alors que tous l’évitaient par crainte que sa conversion ne soit qu’une ruse pour nuire au peuple de Dieu, Barnabas s’était lié d’amitié avec lui, l’avait recommandé, s’était levé en sa faveur devant toute l’Église de Jérusalem (9.26-28). Barnabas avait les yeux pour voir la grâce de Dieu à l’œuvre.

Cette vision, il l’a même exercée dans la difficulté, voire dans le conflit. Un jour, un désaccord profond sépara Paul et Barnabas au sujet de Marc. Ce jeune homme qui avait accompagné Paul et Barnabas au cours de leur premier voyage missionnaire avait fait défaut. Peut-être par manque de maturité, non préparé à la difficulté de la tâche. Barnabas voulait le reprendre pour le voyage missionnaire suivant. Paul s’y opposa de façon catégorique. Leur désaccord fut insurmontable. Leur vision était diamétralement opposée. L’un ne voulait pas d’un poids mort dans l’équipe, l’autre voulait le faire grandir. L’un voulait un rendement immédiat, l’autre prônait la patience, la bienveillance parce qu’il avait discerné un grand potentiel en Marc. Paul partit de son côté avec Silas et Barnabas du sien avec Marc. Qui avait tort ou raison ? Peu importe, Luc reste sobre sur la question. Mais, on peut se poser la question et je me la suis longtemps posée : où est le St-Esprit, de quel côté ? Il faut accepter que le Saint-Esprit œuvre de façon mystérieuse, sans que nous comprenions toujours bien son cheminement. Mais au bout du bout, que constatons-nous : Paul a accompli un œuvre grandiose, arrivé au bout de la course, qui réclame-t-il ? Marc : « Prends Marc et amène-le avec toi ; car il m’est très utile pour mon ministère » Tm 4.11. 

Barnabas avait vu en ce jeune homme qui venait de défaillir, la grâce de Dieu. Il avait su discerner en lui tout son potentiel. Il fallait simplement être bienveillant et encourageant.  

Belle leçon ! Elle est pour nous ! Le caractère profond de quelqu’un détermine ce qu’il voit. Quelqu’un rempli du St-Esprit verra toujours la grâce de Dieu chez les autres. C’est certainement un signe de bonté et une marque de plénitude de l’Esprit que de voir le meilleur et non le pire. Un commentateur, Barclay a écrit que Barnabas « était l’homme au plus grand cœur dans l’Église ».

Il se réjouit

Lorsque Barnabas a vu la grâce de Dieu, il s’est réjoui. Telle fut sa première réaction. Une joie réelle, sincère, profonde. Il voit devant ses yeux l’œuvre merveilleuse que Dieu est en train d’accomplir. Ni les apôtres, ni lui-même, ni quelque missionnaire dûment mandaté n’ont part à ce travail. C’est la surprise totale qui remplit son cœur de reconnaissance et de joie. 

Pas de trace d’amertume, pas l’ombre de jalousie pour cette œuvre qui n’a pas été pilotée par des envoyés de Jérusalem. Encore une belle leçon. Comment réagissons-nous quand nous apprenons que Dieu agit dans des vies, des régions, des églises d’autre tradition que la nôtre ? Ne nous voilons pas la face. Au lieu de nous réjouir, nous recherchons les différences doctrinales, les petites bêtes. Mais l’homme bienveillant, rempli de St-Esprit et de foi se réjouit toujours quand il voit avancer le règne de Dieu dans les cœurs même si nos points de vue théologiques ne concordent pas toujours. 

Il les exhorta

L’épître de Jacques, que nous avons étudié il y a peu, nous a rappelé que nos paroles ont une grande puissance pour le bien ou pour le mal. Elles sont un bon baromètre de notre caractère chrétien. Barnabas, après avoir vu la grâce de Dieu à l’œuvre, les encouragea à rester fidèle au Seigneur avec une ferme assurance. Des paroles d’encouragement, cela fait du bien, aide à aller de l’avant, elles permettent de s’ouvrir au « mais » qui ne manquera pas de venir. Comme nous l’avons déjà dit, tout ne devait pas être parfait par manque de connaissance. Barnabas les encourage à persévérer, à rester fidèle au Seigneur. C’est à lui qu’il faut rester attaché. L’enseignement à venir les aidera à grandir dans leur foi et leur vie chrétienne, leur union avec Christ.

Barnabas avait le souci de voir ces nouveaux convertis donner une place de plus en plus importante à Jésus dans leur vie, de vivre de plus en plus intensément cette union avec Christ. Il les presse d’aller toujours plus en avant, de rester ferme. Cette fonction d’exhortation est un trait récurrent du caractère chrétien de Barnabas. Il apparaît à trois reprises dans le livre des actes. Son surnom « l’homme d’encouragement » révèle une personnalité pleine d’attention, de douceur, de sensibilité.

Il y a aujourd’hui un réel besoin de tels hommes. Il y a dans les églises en général un réel besoin d’hommes remplis d’Esprit-Saint pour encourager les nouveaux convertis, jeunes et moins jeunes à s’attacher au Seigneur et à se donner pleinement à lui. Qu’en est-il dans notre Église ? Certainement que nous avons aussi besoin d’exhorter, encourager, porter, instruire, aimer.

Il alla chercher Paul

Barnabas fit face à cette lourde tâche. Mais très vite il se rendit compte que seul, il ne pouvait suffire. « Il se rendit alors à Tarse pour y chercher Saul. Quand il l’eut trouvé, il l’amena avec lui à Antioche ». Il connaissait bien Saul, il l’avait vu à l’œuvre à Jérusalem, avant que celui-ci ne soit exfiltré pour échapper à la menace des juifs. « Ils passèrent toute une année à travailler ensemble dans l’Église à enseigner beaucoup de gens » (11.25-26).

Trait de caractère marquant de l’homme rempli d’Esprit-Saint : il ne craint pas de reconnaître que le travail à accomplir à Antioche dépassait ses possibilités. Il ne voulait en aucun cas freiner l’œuvre du Seigneur à Antioche en cherchant à s’accaparer cette œuvre. Souvent une réaction purement humaine conduit à cela. Mais l’homme empli d’Esprit-Saint sait reconnaître ses limites et cherche de l’aide auprès de personnes compétentes. C’est la marque d’une grande mesure de grâce et de plénitude de St-Esprit que d’être prêt à partager le devant de la scène et même de se mettre en retrait pour que l’œuvre du Seigneur avance. Il faut assurément être un homme bienveillant, plein de St-Esprit et de foi pour prendre la juste mesure de ses capacités et pour reconnaître qu’un tel est plus qualifié que soi. 

Bien des personnes n’ont pas cette humilité. L’orgueil est là, tapi en chacun d’entre nous. Il suffit quelque fois de peu de chose pour qu’il se manifeste. Vous avez une position de quasi-monopole pour tel ou tel service. Et voilà que quelqu’un d’aussi compétent, voire plus qui arrive. Hélas, souvent, très souvent, trop souvent on ne fait pas de la place au nouvel arrivant le trouvant trop ou pas assez. Moi je fais mieux et je critique. Ce n’est pas la marque d’un homme ou d’une femme empli du St-Esprit. Un homme, une femme, bienveillants, rempli de St-Esprit connaît les limites de ses propres dons et les accepte.

Le résultat ?

Au bout d’un an de collaboration quel résultat ? Simple : « c’est à Antioche que pour la première fois les disciples de Jésus furent appelés « chrétiens ». Ils ont créé une Église qui a mérité le nom de « chrétienne » c’est-à-dire qui appartient au Christ. Le témoignage des membres de l’Église était tel qu’ils étaient connus d’Antioche et sa région sous le sobriquet de « chrétiens », chrétiens, c’est-à-dire appartenant à Christ. Peu importe le sobriquet, ce qui comptait, c’est que Christ soit annoncé et il l’était. Quel témoignage extraordinaire rendu à la vie et au ministère de ces deux hommes. 

Cette nouvelle Église, à l’image de ses leaders a manifesté une compassion profonde pour ses contemporains. Le ministère de Barnabas à Antioche a été décisif pour le développement de l’Église. Elle est devenue missionnaire, c’est de là qu’est parti cette mission qui est allée jusqu’au cœur de l’empire et qui a atteint les extrémités du monde connu. Bienveillance, foi, encouragements, enseignement sous la conduite du St-Esprit ont produit de bons fruits.

Un homme parfait ?

Lorsque nous étudions la vie de tels hommes, nous nous sentons petits. Jamais je n’arriverais à manifester ainsi l’œuvre du St-Esprit dans ma vie. Pourtant ce sont des hommes de la même nature que nous. La preuve ! Gal 2 « Comme Pierre, les autres chrétiens d’origine juive se sont mis eux aussi à cacher leurs véritables convictions, au point que Barnabas lui-même s’est laissé entraîner par leur dissimulation ». Barnabas n’était pas un homme parfait. Il a eu peur du quand dira-t-on, il a cédé à la pression environnante, il a emboité le pas de Pierre et s’est laissé entraîné dans la dissimulation. Même les plus solides, les plus lucides, les figures de proue ne sont pas à l’abri d’un faux pas. Est-ce que cela les disqualifie pour autant ? Je ne doute pas que Barnabas a accepté le bien fondé de la remarque de Paul et a corrigé son attitude. Ne formeront-t-ils pas la première équipe missionnaire engagée auprès des païens ? 

Que Dieu fasse de nous tous des personnes bienveillantes, pleines du St-Esprit et de foi. Je suis persuadé que si, dans notre Église, le St-Esprit lui-même rendait ce témoignage de nous, quelle vie d’Église aurions-nous, quel engagement, quelle vision du monde et de ses besoins serait la nôtre ! Oui St-Esprit viens sur nous et remplis-nous de ta plénitude.

Pasteur Paul Efona