ES-TU CELUI QUI DOIT VENIR ?


Ces derniers semaines j’ai passé pas mal de temps dans la compagnie d’un certain Jean. Non pas Jean l’apôtre, ami de Jésus, mais Jean cousin de Jésus, mieux connu comme Jean-le-Baptiste ou, plus couramment Jean-Baptiste. Et le texte qui a attiré mon attention pour ce matin se trouve dans l’évangile de Luc au chapitre 7, à partir du verset 18-23

 Jean-Baptiste :  précurseur et témoin de Jésus 

Comme Paul nous l’a rappelé la semaine dernière, il est important de bien situer les textes que nous lisons pour bien les entendre et les comprendre.

En fait avant de raconter l’annonce de la naissance de Jésus, Luc raconte l’annonce de la naissance de Jean-Baptiste – et le 1 chapitre de l’évangile de Luc consacre plus de place aux circonstances entourant sa naissance que celle de Jésus – le positionnant dès le début comme précurseur, comme témoin de Jésus. Vous vous souvenez sans doute de cette rencontre entre les deux futures mamans – Élisabeth et Marie – et l’enfant qui trésaille de joie dans le ventre d’Élisabeth, à l’écoute de la voix de Marie, enceinte de Jésus. Et puis il y a ces paroles prophétiques de Zacharie, son père :

Et toi, petit enfant, tu seras appelé prophète du Dieu très-haut,

car tu marcheras devant le Seigneur pour préparer ses chemins. (Luc 1 :76)

On rencontre à nouveau Jean-Baptiste au tout début du ministère public de Jésus au chapitre 3, où il appelle au baptême de repentance et annonce la venue imminente d’un autre  : Celui qui sera plus fort. Celui dont il ne sent pas digne de défaire les sandales.

Et nous apprenons dans ce même passage que le message de Jean déplaît  à Hérode, parce qu’il condamne son mariage avec la femme de son frère, ce qui amène Hérode à mettre Jean en prison.

A partir de ce moment, l’attention de Luc quitte Jean et se tourne vers Jésus et son ministère en Galilée. Nous voyons Jésus guérir des malades ; expulser des démons ; appeler des disciples ; prononcer de bénédictions et même ramener un jeune homme à la vie… enseigner dans les synagogues où il proclame la bonne nouvelle du royaume, présentée comme « la bonne nouvelle aux pauvres, délivrance pour les prisonniers, retour à la vue pour les aveugles, libération pour les opprimés, année de manifestation de la faveur du Seigneur.

Jean-Baptiste : la foi à l’épreuve du doute

Et pendant tout ce temps, Jean se trouve confiné, en prison. Ça a dû être une horreur pour lui – lui qui avait l’habitude de vivre dehors, dans les lieux déserts. Et on dirait qu’il commence à perdre pied, commence à se poser des questions. Jusqu’à ce qu’il n’en peut plus et envoie des messagers voir son cousin. 

Remarquons ce qui déclenche ce besoin de savoir – ce besoin d’envoyer les messagers – et ce doute apparent sur Jésus. Ce n’est pas le fait de se trouver injustement en prison, ni les conditions qu’il y vit : « Les disciples de Jean racontèrent tout cela à leur maître » 

Tout cela. Ce que les disciples de Jean-Baptiste racontent sur les activités et les enseignements de Jésus à l’air de soulever des doutes chez Jean-Baptiste :

« Es-tu celui qui doit venir ou devons-nous attendre quelqu’un d’autre ? »

Etrange réaction, n’est-ce pas ? Ou peut-être pas si étrange que cela. Voyez-vous – en tant que lecteur aujourd’hui, nous avons l’habitude du ministère de Jésus : ses récits, ses actions, son enseignement. Et nous connaissons la fin de l’histoire. Mais Jean, au moment de cette histoire n’en savait pas autant. Écoutons à nouveau ce que Jean a dit pendant son ministère au désert :

Il annonce la venue de :

Celui qui baptisera dans l’Esprit saint et dans le feu. Celui qui tient en sa main la pelle à vanner pour séparer le grain de la paille. Il amassera le grain dans son grenier, mais il brûlera la paille dans un feu qui ne s’éteint jamais.

Jean a l’aire de s’attendre à ce que la mission de Jésus soit une mission de jugement, de séparation, de condamnation. Comme beaucoup de ses contemporains, il attend la venue du Messie – mais il s’attend à ce que ce Messie soit guerrier – celui qui expulsera l’occupant romain, qui purifiera la pratique religieuse – qui sera l’instrument de la colère de Dieu. Et que fait Jésus ? Il ne se conforme pas à ce programme. 

Il passe son temps en Galilée – loin des centres de pouvoir. Certes, il appelle des disciples, mais ce n’a rien d’un début d’armée – des pêcheurs, un collecteur d’impôts (bref un collabo). Jean s’attend à ce que Jésus organise la révolution – et Jésus se balade paisiblement de village en village enseignant tous ceux qui veulent bien écouter, prêchant l’amour pour les ennemis, et – et c’est peut-être là le comble, l’événement qui déstabilise Jean : Jésus  guérit le serviteur d’un centurion – bref un membre du foyer de l’armée occupant….

Qu’est-ce qui se passe ? A quoi pense Jésus ?… Au fond de sa cellule, Jean commence à s’inquiéter.

N’oublions pas. La vie entière de Jean, l’identité profonde de Jean, est fondée sur son appel – cet appel d’annoncer celui qui doit venir. Il s’est privé d’une vie « normale. Pas de femme, ni d’enfants – mais plutôt cette vie étrange dans les lieux déserts ou, selon Marc, il se nourrit de sauterelles et de miel sauvage.

Bref, Jean a tout misé sur Jésus, sur sa mission, sur son ministère. Selon l’évangile de Jean, il a même dit à ses disciples de suivre Jésus. Alors, si Jésus n’est pas le messie – Jean est mal. Sa vie entière n’a pas de sens. Si Jésus n’est pas le messie – l’identité même de Jean ne tient plus la route. Si Jésus n’est pas le messie – que faire de toutes ses histoires de prophétie, d’anges, sûrement racontées par sa mère et la tante Marie à chaque réunion de famille. Si Jésus n’est pas le messie – que devient Jean. Qui devient-il ?

Pas étonnant donc si Jean perd pied… Mais il fait quelque chose de très sage. Plutôt de rester là tout seul, à tourner les choses dans sa tête – moi j’aurais sans doute passé des semaines à monter tout un film dans ma tête – mais Jean est sage, plus sage que moi – il envoie 2 disciples à Jésus pour lui poser sa question.

Les signes du Royaume attestent que  Jésus est le Messie

A la première lecture, on dirait que la réponse de Jésus est un peu a côté de la plaque :

« Allez raconter à Jean ce que vous avez vu et entendu : les aveugles retrouvent la vue, les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés de leur lèpre, les sourds entendent, les morts ressuscitent, la bonne nouvelle est annoncée aux pauvres. 23Heureux celui qui n’abandonnera pas la foi à cause de moi ! »

On peut imaginer que les disciples de Jean auraient reposer la question – tout ça c’est très bien Jésus, mais pour revenir à notre question : Es-tu celui qui doit venir ?

Mais en réalité, le message est plutôt clair et aurait été facilement compris par Jean. Car la réponse de Jésus se compose de citations du prophète Esaïe. 

Esaie 35 : 5, Alors les yeux des aveugles s’ouvriront, et les oreilles des sourds entendront. 6Alors le boiteux bondira comme un cerf et le muet exprimera sa joie.

Esaie 61 : 1 L’Esprit du Seigneur est sur moi, car il m’a choisi pour son service ; il m’a donné pour mission d’apporter aux pauvres une bonne nouvelle et de prendre soin des désespérés ; ma mission est de proclamer aux captifs qu’ils seront libres désormais et de dire aux prisonniers que leurs cachots vont s’ouvrir ;

Nous savons que Jean connaissait bien Esaïe – tout son ministère est accompagné d’allusions à ce grand prophète de l’AT. En envoyant cette réponse, Jésus est en train de dire à son cousin qu’il est bien le Messie – qu’il remplit bien les prophéties de l’AT – même si ce n’est pas de la manière attendue par Jean et beaucoup de leurs contemporains.

Que chaque malade guéri, que chaque enfant béni est à la fois signe de l’approche du Règne de Dieu, à la fois confirmation de l’identité messianique de Jésus et à la fois acte d’amour, de bénédiction de la part de Jésus envers des hommes, des femmes et des enfants créés et aimés de Dieu.

Et Jésus termine par une parole de bénédiction et d’encouragement rien que pour Jean, pour celui dont les genoux chancellent, celui qui perd courage : « Heureux celui qui n’abandonnera pas la foi à cause de moi ! » 

Nous ne savons pas comment Jean a reçu cette réponse. Cette parole d’encouragement. Mais j’aime penser que ça l’a encouragé, fortifié pendant ces derniers jours sur cette terre. Confirmé que sa mission n’était pas vaine – même s’il n’allait pas voir la suite de l’histoire.

Des enseignements pour nous aujourd’hui

Comment entendre tout cela – nous qui vivons ces drôles de jours confinés d’une autre manière et pour d’autres raisons ?

Déjà cette histoire nous invite à l’humilité. Dieu n’agit pas toujours en conformité avec nos attentes. Jean-Baptiste était très bien placé pour comprendre la mission, le ministère de Jésus. Il était de sa famille biologique. Il était de sa culture. Il parlait sa langue – il connaissait les écritures. Et il a été quand même un peu à côoté de la plaque dans sa compréhension. Jésus ne s’est pas comporté selon ses attentes. Jésus ne suit pas nos programmes. Il ne fait pas toujours selon notre volonté. Et c’est normal n’est-ce pas ? Ne nous a-t-il pas appris à prier « Que TA volonté soit faite ». Il est Seigneur. Il est parole créatrice de Dieu. Il est l’Alpha et l’Omega. Normal que nous avons quelque fois du mal à comprendre.

Mais ce n’est pas parce que nous ne comprenons pas qu’Il n’est pas à l’oeuvre. Dans l’hymne magnifique de la lettre à l’église de Colosses, l’apôtre Paul dit au sujet de Jésus 

qu’Il existait avant toutes choses, et c’est par lui qu’elles sont toutes maintenues à leur place.

C’est aussi vrai aujourd’hui qu’il y a deux mille ans. Jésus continue à tenir la création entière dans ses mains – même quand nous ne comprenons pas, nous pouvons lui faire confiance. Et nous pouvons faire 2 choses encore :

J’ai dit que Jean a fait quelque chose de très sage en envoyant des disciples parler à Jésus. Nous pouvons faire encore mieux. Nous pouvons parler nous même en direct à Jésus dans la prière – et, quand nous nous en sortons pas, nous pouvons faire comme Jean en demandant à nos amis, à nos frères et sœurs en Christ de nous accompagner, nous aider – en priant avec nous, en priant pour nous. Parce que c’est vrai, des fois nous ne nous en sortons pas tout seul. Nous n’arrivons pas à mettre des mots sur notre souffrance  et l’aide des autres peut être précieuse pour nous dans ces temps-là. Et même si nous ne pouvons pas nous rencontrer les uns et les autres en ce moment pour demander la prière, Dieu a permis l’invention des moyens de communication différents, qui permettent qu’on ne soit pas privés du soutien, des prières des uns et des autres, même pendant ces jours que nous vivons. Ne nous en privons pas.

Et 2e chose – nous pouvons écouter ses réponses. Jésus a répondu à Jean d’une manière compréhensible, lisible pour lui en attirant son attention sur les textes des Écritures qui clarifient sa mission. Nous pouvons nous attendre à ce qu’il nous réponde de manière compréhensible, lisible pour nous, par les textes de sa parole, par le conseil ou les mots d’un ami, par la beauté de la création, même par un rêve ou par un songe – gardons nos oreilles et nos yeux ouverts et attentifs pour discerner les signes de sa présence, de son activité, auprès de nous, y compris de manière inattendu.

Prions :

Seigneur, il y a tellement de choses qui nous dépassent dans ce monde. Tellement de jours où nous ne comprenons pas ce qui se passe. Aide nous à nous tourner vers toi dans la confiance, dans la prière. Et quand nous venons avec nos questions, aide-nous à t’entendre, à t’écouter et à te faire confiance. Au nom de Jésus. Amen


Pasteure Alison WYLD