04 Fév TENIR BON FACE AUX DIFFICULTES !
Introduction
Le moral des français fait le « yoyo » au gré des différentes vagues de la pandémie de la Covid-19.
L’été dernier, le moral des français s’était amélioré dans la foulée de l’allègement progressif des restrictions sanitaires. Les ménages se disaient plus confiants, et les « écureuils », ceux qui d’habitude plébiscitent le livret d’épargne, avaient un peu plus envie de dépenser.
Mais depuis l’apparition du variant Omicron et la flambée que nous avons connue, le moral des gens a pris un grand coup. Fatigue, incertitude, colère, épuisement… face à l’incapacité de se projeter, la santé mentale se dégrade.
D’après le dernier baromètre publié par Santé publique France (CoviPrev), près d’un tiers des Français interrogés présentaient fin décembre un état anxieux ou dépressif. Ils étaient aussi 68% à vivre des problèmes de sommeil et 10% à avoir eu des pensées suicidaires. C’est beaucoup plus qu’il y a deux ans (source : Hebdo Réforme n°3929)
Alors, comment tenir bon dans la traversée de ce tunnel dont on peine à voir le bout ? Comment ne pas se laisser « dévitaliser » par l’anxiété collective et tenir bon aussi bien spirituellement que psychologiquement ?
Je vous propose de relire ensemble un texte de l’apôtre Paul qui peut nous aider à trouver des ressources pour tenir bon au milieu des difficultés inévitables qui jalonnent la vie.
Philippiens 4 : 1 à 9
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Paul tient bon même en prison
Lorsqu’il écrit cette lettre aux Philippiens, nous le savons, l’apôtre Paul est en prison à Ephèse ou à Rome selon les hypothèses. Dans ces circonstances douloureuses et difficiles, l’apôtre Paul veut que les Philippiens, inquiets quant à son sort, sachent que l’épreuve de son incarcération ne compromet en rien le projet de Dieu. D’ailleurs, Dieu s’est aussi servi de ces circonstances difficiles pour que l’Evangile soit annoncé plus loin encore, jusqu’au prétoire. Et même si l’apôtre a envisagé l’hypothèse d’une condamnation à mort, il garde cependant l’espérance et l’assurance que le Seigneur interviendra en sa faveur et qu’il sera prochainement libéré.
Mais l’apôtre ne s’étale pas sur sa situation. Ce qui l’importe davantage c’est d’encourager et d’aider les Philippiens à tenir bon dans la foi.
En effet, les Philippiens avaient affaire à un groupe de judaïsants ayant une conception légaliste et nationaliste de l’appartenance au peuple de Dieu. Ce groupe de personnes enseignaient qu’il fallait se faire circoncire pour intégrer le peuple élu, ce qui leur permettait d’échapper à la persécution, d’éviter de souffrir l’opposition et l’hostilité de ces enseignants prétentieux qui se glorifiaient de leur zèle légaliste et pensant avoir déjà atteint la perfection.
C’est à ce groupe de personnes que l’apôtre s’en prend farouchement au chapitre 3. Ces « mauvais ouvriers », ces « chiens » dit l’apôtre Paul, se « conduisent en ennemis de la croix de Christ » (3.18) et ça va mal se terminer pour eux, puisque, comme l’écrit l’apôtre : « Leur fin, c’est la perdition ; ils ont pour dieu leur ventre, ils mettent leur gloire dans ce qui leur fait honte, ils ne pensent qu’aux réalités de ce monde. » (cf. 3.19)
Contrairement à ces mauvais ouvriers qui courent à leur perte en rejetant l’Evangile de la croix, L’apôtre Paul encourage les Philippiens à tenir bon en demeurant, comme lui, attachés au Christ, qui a souffert lui-même, et est allé jusqu’à la croix, préférant l’obéissance à Dieu à la gloriole humaine.
Tenez bon !
L’apôtre Paul avec une tendresse fraternelle exhorte ses frères et sœurs à tenir bon dans différents domaines
- En étant unis à Jésus
Comme pour la construction d’un édifice, de solides fondations sur un terrain adapté, sont importantes pour supporter l’édifice. Pour les chrétiens de même, notre vie doit d’abord se fonder sur le rocher de notre salut, Jésus-Christ, notre Sauveur. L’expression « dans le Seigneur » ou en « étant unis à Jésus » vise cette relation première et fondamentale que nous avons avec le Seigneur. Comme des branches qui font corps avec le tronc d’un arbre, ainsi, nous aussi, nous avons étés incorporés au Christ, notre Seigneur. Nous sommes devenus selon une image que le Christ lui-même emploie, ces sarments qui sont attachés au Cep, et en Jésus. Si nous ne demeurons pas dans cette communion vitale, nous nous dévitalisons, et, dès lors, nous ne portons plus du fruit. (cf. Jean 15)
Ce fruit que l’apôtre appel ailleurs fruit de l’Esprit (Cf. Gal 5) se manifeste d’abord comme un fruit de communion et d’unité. Le Saint-Esprit n’est pas d’abord un sujet de controverse théologique, mais le témoin véridique du Christ, qui rend témoignage à Jésus, nous convainc de son amour, de son œuvre rédemptrice et nous place concrètement au bénéfice de la grâce qui en découle.
- En étant unis les uns aux autres
La communion fraternelle est aussi l’une des dimensions de la grâce de Dieu. Le livre des Actes des apôtres, entre autres, souligne souvent cette dimension importante qui constitue l’Eglise. Unis au Christ, les chrétiens forment une famille, la famille de Dieu. Au sein de cette famille, l’unité et la solidarité sont des valeurs que l’Ecriture nous encourage à cultiver. C’est cette recommandation générale que l’apôtre adresse au chapitre 2 :
« 1Si votre union avec le Christ vous donne du courage, si son amour vous apporte du réconfort et si vous êtes en communion avec lui par l’Esprit, si vous avez de la tendresse et de la bonté les uns pour les autres, 2alors, comblez-moi de joie en vous mettant d’accord, en ayant un même amour, en étant unis par le cœur et par la pensée. » (phi 2 : 1-2)
C’est cette recommandation que l’apôtre Paul applique à la situation d’Evodie et Syntyche à propos desquelles nous ne savons presque rien de plus que leurs noms d’origine grecque. La nature de leur conflit nous est également inconnue. Le principal n’est pas dans ces détails dont nous sommes souvent friands, mais bien dans l’effort à mettre en œuvre pour aider ces sœurs, à qui Paul rend d’ailleurs un bon témoignage : « elles ont combattu avec moi pour l’Evangile », à surmonter leur conflit pour conserver le lien de l’unité et de la paix. Ce chemin vers la réconciliation, dans le cas de ces sœurs, demande par l’intervention d’un tiers, d’un serviteur dont l’identité n’est pas non plus précisée.
Les temps que nous traversons sont aussi marqués par d’importantes fractures relationnelles au sein de la société. La pandémie n’a rien arrangé à cette fragmentation des liens : entre les vaccinés, les antivaccins, les sceptiques qui peuvent d’ailleurs être des deux bords, les relations peuvent être abîmées. Ajoutons à ceci la campagne électorale avec son lot de débats clivants… alors nous comprendrons que ce dont nous avons besoin, c’est des hommes et des femmes de paix, au service du ministère de la réconciliation. Nous en avons besoin dans nos familles, dans la société, et dans l’Eglise-famille de Dieu.
- En cultivant la joie et la gratitude
Dans cette épître, l’insistance de l’apôtre sur l’importance de la joie est massive à un point que certains commentateurs ont parlé de cette lettre comme d’une épître de la joie.
Cette joie trouve toujours sa source dans le Seigneur. Il ne s’agit pas de la pensée positive, mais d’un fruit que produit l’Esprit-Saint dans le cœur de celles et ceux qui sont unis à Jésus. L’éclat d’une telle joie peut être ternie par les difficultés de la vie, la souffrance, les inquiétudes, l’anxiété, etc.
Cependant la perspective du retour du Seigneur, est de nature à aider les chrétiens à garder l’espérance et la joie. Le Seigneur est proche, non seulement parce qu’il est à nos côtés par son Esprit, mais aussi parce qu’il revient bientôt !
- En cultivant la paix plutôt que de nourrir nos inquiétudes
En attendant, comment vivre l’incertitude et les inquiétudes du temps présent ? L’apôtre Paul n’a pas d’autre recommandation que celle du Seigneur lui-même
« 31Ne vous inquiétez donc pas en disant : “Qu’allons-nous manger ? Qu’allons-nous boire ? ou qu’allons-nous mettre pour nous habiller ?” 32Ce sont les païens qui recherchent sans arrêt tout cela. Mais votre Père qui est au ciel sait que vous en avez besoin. 33Cherchez d’abord le règne de Dieu, cherchez à faire sa volonté, et Dieu vous accordera aussi tout le reste. 34Ne vous inquiétez donc pas du lendemain car le lendemain s’inquiètera de lui-même. À chaque jour suffit sa peine. » (Cf. Mt 6.31-34)
Il ne s’agit pas, face aux difficultés ou aux angoisses de notre temps, d’être dans le déni de la réalité. Le chrétien doit rester lucide face au réel. Cependant, il sait aussi que sa vie, en fin de compte, est entre les mains de son Père céleste qui sait de quoi chacun de ses enfants a besoin. A chaque jour suffit sa peine, et nous pouvons ajouter sa joie.
- En restant vigilants dans le domaine de nos pensées
Dernier point, l’appel à la vigilance dans le domaine de nos pensées : « 8Enfin, frères et sœurs, portez vos pensées sur tout ce qui est vrai, tout ce qui est honorable, tout ce qui est juste, tout ce qui est pur, tout ce qui est digne d’être aimé, tout ce qui mérite l’approbation, ce qui est synonyme de valeur morale et ce qui est digne de louange. »
Les vertus que l’apôtre Paul recommande ici ne sont pas spécifiquement exclusivement chrétiennes. Le Stoïcisme mettait en valeur de telles qualités morales. L’apôtre considère que dans l’attachement au Christ, les chrétiens puisent la force de mener une vie moralement bonne. La grâce de Dieu correctement comprise nous instruit à renoncer au péché, et à marcher en nouveauté de vie. Cette nouveauté de vie se manifeste par l’attachement à tout ce qui est digne d’approbation devant Dieu, et même devant les hommes. A une époque où prospèrent les « fake news » qui empoisonnent notre société, il est important de cultiver ce qui est vrai, ce qui correspond à la réalité, et non ce qui est mensonger. Dans un monde où persistent les injustices sociales et les abus en tout genre, nous pouvons espérer que les chrétiens soient des promoteurs de la justice, de la fraternité, de la solidarité.
Ne nous laissons pas abreuver par les discours haineux et outranciers que nous entendons ou lisons ici ou là. Ne laissons pas nos pensées être le réceptacle, la poubelle des salissures de notre monde. Au contraire, comme le dit Paul, recherchons tout ce qui est vrai, honorable et dont nous n’avons pas à rougir ni devant notre Seigneur, ni devant les hommes et les femmes de notre temps.
Conclusion : Passez aux actes !
Face au groupe des Judaïsants qui troublent les Philippiens au risque d’en détourner plusieurs, Paul réagit avec force pour encourager les chrétiens à tenir ferme dans l’enseignement apostolique qu’ils ont reçu avec foi. Ils peuvent continuer de tenir bon grâce à leur union avec Jésus-Christ. Ils peuvent tenir bon, en restant unis les uns aux autres, en cultivant la joie et la gratitude, et face aux inquiétudes, ils peuvent choisir avec Dieu la confiance, sachant que le Seigneur est proche. Sachant cela, ils sont encouragés à mettre en pratique ce qu’ils ont appris. Nous aussi, ne soyons pas des auditeurs oublieux. Tenons bon en restant ancrés dans l’amour de Dieu et la communion fraternelle, en étant des artisans de paix, de réconciliation et de justice dans un monde en souffrance, qui a besoin plus que nous ne le croyons peut-être, des témoins authentiques de l’Evangile de Jésus-Christ. Que le Seigneur nous soit en aide. Amen !
Paul EFONA, pasteur de l’EBGE